Le « délit de sale gueule » : une stigmatisation infondée
Le « délit de sale gueule » désigne ce réflexe courant qui consiste à juger de la dangerosité d’un chien sur la seule base de son apparence ou de sa race, sans tenir compte de sa personnalité ni de son vécu. Cette idée reçue alimente la peur chez beaucoup de personnes, parfois au point d’empêcher une rencontre ou un contact avec certains animaux. Malheureusement, des races telles que le malinois, le rottweiler ou l’American staff souffrent particulièrement de cette stigmatisation, victimes de leur image dans l’imaginaire collectif.
Le cas du malinois : victime de son succès et de ses préjugés
Le malinois, chien belge réputé pour son intelligence, sa rapidité et sa polyvalence, a conquis les forces de l’ordre et le grand public. Mais son physique athlétique et sa réputation de chien « puissant » font naître autant d’admiration que de crainte. Trop souvent adopté pour son allure, il se retrouve dans des familles peu informées de ses besoins spécifiques : énergie débordante, nécessité de stimulation mentale et d’une éducation solide.
Si le malinois fait peur, ce n’est ni à cause de sa race ni de son tempérament, mais bien parce que la méconnaissance de ses particularités conduit à des situations à risque. Un chien incompris, mal éduqué ou mal accompagné peut, comme n’importe quel autre, développer des troubles du comportement.
La peur des chiens : légitime, mais souvent amplifiée par les préjugés
Il faut reconnaître que la peur des chiens, surtout après une morsure ou un incident, est réelle et mérite d’être prise en compte avec empathie. Beaucoup de personnes, adultes ou enfants, peuvent éprouver un malaise face à un chien, que ce soit à cause d’expériences passées ou simplement par crainte de l’inconnu. Cependant, généraliser cette peur à une race ou à une apparence est injuste : les statistiques montrent que les chiens impliqués dans des accidents sont bien souvent de toutes tailles et origines.
L’avis des scientifiques français sur le « délit de sale gueule »
Les spécialistes du comportement animal en France, soutenus par les recherches de l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail), sont unanimes : il n’existe pas de race ou d’apparence intrinsèquement dangereuse. Les éthologues et vétérinaires comportementalistes insistent sur le rôle central de l’environnement, de la socialisation, de la gestion humaine et du parcours de vie du chien. Les comportements agressifs ou problématiques découlent beaucoup plus de l’éducation, des conditions de vie et de l’accompagnement, que de la génétique ou du physique.
Conclusion : le vrai enjeu, c’est l’éducation et l’accompagnement
Il n’existe pas de chien dangereux par essence, mais des chiens mal éduqués ou mal compris. La différence fondamentale réside dans la façon dont les humains assument leur rôle : responsabilité, pédagogie et capacité à adapter les méthodes à chaque individu. Pour les éducateurs et éducatrices canins, il est primordial de reconnaître ses propres limites : savoir demander l’aide de spécialistes ou orienter une famille vers une personne mieux qualifiée est un signe de professionnalisme, et non de faiblesse.
La peur des chiens est humaine et doit être entendue, particulièrement chez celles et ceux ayant subi des morsures, graves ou non. Mais stigmatiser un animal pour son apparence ou sa race ne fait qu’alimenter des peurs collectives, sans jamais résoudre le problème de fond.
Répétons-le : il n’y a pas de mauvais chiens, seulement des chiens mal accompagnés. La clé pour une cohabitation harmonieuse réside dans l’éducation, la compréhension et la responsabilisation de l’humain. Il est du devoir de chaque éducateur et éducatrice de faire preuve de pédagogie, d’accompagner avec bienveillance et de savoir reconnaître quand il est temps de passer la main à un ou une spécialiste pour le bien-être du chien et de sa famille humaine.
Bibliographie française
ANSES, « Les facteurs de risque de morsures chez le chien », Rapport scientifique, 2019.
C. Léonard, Comportement du chien et éducation canine, Éditions Ulmer, 2016.
J.-L. Martin, Vivre avec son chien, Éditions du Point Vétérinaire, 2021.
F. Roussel, Les chiens : psychologie et comportement, Éditions Odile Jacob, 2015.
Y. Mante, « La stigmatisation des races : étude sur les préjugés en cynologie », Revue Française de Cynologie, 2020.
Scientifiques cités
C. Léonard, éthologue canin
J.-L. Martin, vétérinaire comportementaliste
F. Roussel, spécialiste en psychologie animale
Y. Mante, cynologiste
ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail)
Filippo Naso – Éducateur Canin - Méthode Zen - Éducation Positive et Bienveillante
Contact : 06 74 79 19 78